Encore un petit mot
29 avril 2008
J'ai un peu de temps ce soir, alors je compléterai
ce que j'étais en train de vous dire et partagerai
quelques photos de la vie simple que je mène ici.
Chaque jour, les nonnes, environ 200, se lèvent
à 3h du matin pour faire leur méditation
et leur pratique personnelle. À 6h nous commençons
nos prières en groupe dans le temple, et puis vers
10h je donne quelques instructions concernant la pratique
des Ngöndro, les Quatre fondations, qui comprennent
100 000 prosternations, 100 000 Vajrasattva,
100 000 offrandes du mandala et 100 000 Gourou
Yoga. En fait, la plupart des nonnes ici ont déjà
terminé trois ou quatre séries de Ngöndro,
mais puisqu'il y a aussi de nouvelles nonnes, j'ai pensé
les faire commencer par les Ngöndro, et bien sûr,
j'espérais ainsi les aider à développer
la motivation correcte, et pour les nonnes qui ont déjà
fait les Ngöndro, cela peut servir de révision.
Je pense que de ce point de vue, je suis un maître
assez tenace et traditionnel. C'est très difficile
pour moi de donner des enseignements tantriques plus élevés
si mes étudiants et mes amis n'ont pas terminé
si ce n'est qu'une seule série de Ngöndro.
La plupart du temps, dans un temps dégénéré
pareil, les gourous devraient être moins exigents
vis-à-vis leurs étudiants et leurs amis,
comme ne pas forcément faire les Ngöndro,
etc. Sinon, les gourous seront au chômage car il
n'y aura pas de disciples qualifiés. Mais jusqu'ici
je suis fier de dire que mes nonnes, certains moines et
bien sûr quelques laïcs réalisent mes
souhaits. Pour l'instant, tout va bien !
Puis l'après-midi, certaines nonnes apprennent
l'anglais, d'autres des rituels et encore d'autres le
tibétain. Le soir, nous pratiquons ensemble et
parfois je donne quelques instructions précises
aux nonnes plus anciennes.
Aujourd'hui nous avons fait un long puja de Mitrupa pour
les morts. Comme vous le savez, nous recevons souvent
des offrandes pour réaliser des prières,
notamment pour les morts. Personnellement, je suis très
prudent avec l'argent offert, en particulier pour les
personnes décédées. Pourquoi ?
C'est parce que si ce type d'offrande n'est pas utilisée
au bénéfice de la personne décédée,
cela créera des problèmes pour cette dernière
qui obtiendra une renaissance inférieure et entraînera
à terme ma propre chute. J'ai parlé dans
"Ma folle histoire" à propos de ces Offrandes
noires ou Kor Nag. Je me sens mal à l'aise à
l'idée d'utiliser ce genre d'offrande ou quoi que
ce soit dédié au bien des êtres pour
une utilisation personnelle ou pour quelque satisfaction
que ce soit. C'est quelque chose contre laquelle mes gourous
m'avaient mis en garde, et j'ai de la chance d'avoir pu
suivre leurs conseils.
Langna Rinpoché et Kunga Rinpoché sont
ici avec moi. Langna Rinpoché fait ses Ngöndro
et une retraite tandis que Kunga Rinpoché m'aide
avec tous les pujas et cérémonies. Ce dernier
aide également à apprendre les rudiments
du tibétain aux nonnes vietnamiennes et malaisiennes.
J'espère que les nonnes se débrouillent
bien. À propos, je voulais vous parler un peu de Kunga
Rinpoché. Les personnes qui me suivent depuis un
moment devraient savoir de qui il s'agit. Avant son intronisation,
on l'appelait Péma Namgyal, et il était
un de mes serviteurs et un moine. Il y a environ un an,
quand le moment approprié est venu, je l'ai intronisé
en tant que Kunga Rinpoché. Dans sa vie précédente,
il était un disciple direct du grand tertön
Drubwang Shakya Shri et avait lui-même de nombreux
disciples à Garsha. Quand il était devenu
âgé, il n'avait pas besoin de marcher car
deux de ses disciples le portaient partout où il
allait. Un des ces derniers a eu un fils peu de temps
après le décès du précédent
Kunga Rinpoché. L'enfant a été reconnu
comme Kunga Rinpoché par mes deux gourous, Sa Sainteté
Dudjom Rinpoché et Kyabjé Thuksey Rinpoché.
Mais, en raison de certains obstacles, la reconnaissance
officielle n'a pas eu lieu. Son père me l'a offert
quand il avait 15 ans environ, et c'est seulement l'année
dernière qu'il me semblait le moment opportun de
l'introniser formellement. Je sais qu'en raison de son
dévouement bienveillant envers moi, il lui est
très difficile de me quitter pour se rendre à
son monastère à Garsha. Mais un jour, il
devra retourner dans sa communauté les guider.
C'est parce que, si vous le croyez ou non, les personnes
comme nous sont censés vivre pour bénéficier
et guider autrui. Je vous demande, mes amis et étudiants,
de lui apporter tout l'encouragement que vous pouvez afin
qu'il n'ait aucun problème à aider sa communauté
le moment venu.
Il y a quelques semaines, suite à de nombreuses
demandes de la part de mes étudiants au Vietnam
et des parents de la fille, j'ai enfin décidé
d'ordonner cette petite fille. Elle est connue sous le
nom de "Jigmé Rangjung Khandro", la Dakini
auto-manifestée intrépide, et elle n'a que
cinq ans. J'ai demandé qu'elle garde trois parties
de ses cheveux, sans tout raser, comme rappel des trois
racines, le Gourou, le Daka et la Dakini. Je suis tellement
content de pouvoir aider les enfants quand ils sont jeunes.
De nos jours, je pense que les jeunes adoptent la spiritualité
"trash". De quoi s'agit-il ? De la nourriture
"trash" de la restauration rapide, de la musique
"trash", des vêtements "trash".
Tout ce qui est "trash" constitue leur croyance
spirituelle. C'est rempli de "je", "je"
et encore "je". Alors la santé décline,
le moral baisse, la vie s'écroule. Je ne sais vraiment
pas ce que je peux faire avec mes capacités limitées
pour les aider. Je ne pense pas qu'ils voudraient être
moine ou nonne un jour, tout comme ils ne voudraient pas
venir aux enseignements, aux pujas ou aux pèlerinages.
Je pense que l'exemple et les conseils des parents sont
très importants afin que les enfants bénéficient
d'une connexion à la spiritualité très
tôt, et pour que, quand ils sont grands, ils aient
au moins une base et soient protégés intérieurement
de nombreuses différentes sortes de comportements
violents, d'émotions négatives, etc. C'est
très important, je pense.
Cependant, il y a quelques jeunes filles ici qui veulent
vraiment être ordonnées comme mes nonnes.
J'ai envoyé trois ou quatre d'entre elles du village
à une autre nonnerie à Pharping parce que
je n'ai tout simplement pas la place et les ressources
pour accueillir d'autres nonnes. À cause de la pénurie
du diesel, les prix sont montés en flèche.
Cela me coûte trois fois plus cher que d'habitude
pour faire tout tourner à Mont Druk Amitabha. Je
plains mes amis et étudiants qui font partie de
l'équipe de collecte de fonds. Le montant des fonds
disponibles est toujours insuffisant en raison de l'inflation
quotidienne. Pas plus tard que la semaine dernière,
le prix d'un sac de ciment était de 400 roupies,
et aujourd'hui il coûte 650. Et donc, notre budget
initialement établi pour constuire deux résidences
de plus pour nos nonnes va devoir servir à compléter
d'autres projets en cours. Alors on dirait que certaines
de mes pauvres nonnes devront continuer à se tasser
dans de petites chambres. Je prie ardemment que la situation
ici s'améliore. Sinon, il s'agit vraiment d'un
des meilleurs endroits pour la pratique spirituelle, foisonnant
de bénédictions, et le climat est en fait
très bon. Les nonnes ne tombent pas malades comme
au Ladakh.
Hier, un de mes très vieux amis, Tashi Dorjé,
et sa fille m'ont rendu visite à l'improviste.
Tashi est une des personnes qui aident le plus à
Hémis. Depuis mon plus jeune âge, j'ai pu
voir à quel point Tashi tavaillait dur pour Hémis
et sa restoration. Auparavant, il était le Commissaire
adjoint du Ladakh. Il a reçu une promotion et maintenant
il habite en Jammu. Il est très rare de rencontrer
quelqu'un comme lui de nos jours. Son père est
un grand yogi au Ladakh et ses frères sont de grands
pratiquants. Notre bien-aimé Amchi Rigzin, le mèdecin
que vous connaissez tous, est son frère. Il réussit
très bien sa carrière et il est très
fortement motivé pour pratiquer. Il est ici avec
sa benjamine pour faire plus de 100 koras du stoupa de
Swayambhunath. Pouvez-vous le croire ? Je ne pense
pas que beaucoup de gens qui réussissent au travail
feraient tant d'efforts. Je suis sûr que certains
parmi vous le feraient, mais je ne pense pas que beaucoup
d'entre vous le feraient, n'est-ce pas ? C'est tellement
difficile pour certains d'entre vous de laisser pendant
un instant votre travail, votre maison, votre famille
et vos amis, et même de vous accorder une pause,
alors il serait plus difficile de venir à Katmandou
pour dix jours, rien que pour faire des koras. Vos amis
doivent penser que vous êtes fou, vous ne croyez
pas ? Pouvoir maintenir l'équilibre entre
la vie mondaine et la vie spirituelle, et réussir
les deux est véritablement une grande qualité.
J'aimerais féliciter Tashi Dorjé d'être
capable de le faire.
Mes parents se reposent beaucoup, alors leur état
de santé est plus stable. Je ne veux pas qu'ils
aient du stress. Il est temps qu'ils passent un moment
agréable et se reposent. Bien sûr, de grands
pratiquants comme eux ne pensent pas de la sorte. Ils
sont constamment en train de pratiquer pour le bien de
tous. J'ai tellement de chance de les avoir comme parents.
Ils m'ont donné tout l'amour mondain et tous les
conseils spirituels. En ce sens, je suis vraiment un type
qui a de la chance.
Enfin, je suppose que mon long message doit beaucoup
vous ennuyer, alors je m'arrête pour le moment.
|
Pendant les pujas
Les nonnes qui apprennent
l'anglais avec Yeshé Choedrön
Pendant que je menais
le puja de Mitrupa
Kunga Rinpoché
en train d'enseigner le tibétain aux nonnes vietnamiennes
et malaisiennes
Kunga Rinpoché
Jigmé Rangjung Khandro
Avec Tashi et sa fille
Avec ma mère
Mon père avec Ting
et
ma mère avec Xing
|